Je discutais il y a quelques temps avec un ami d’enfance, dont le parcours de vie n’a pas été facile, et qui, à force de travail et de volonté, grâce à la bienveillance de son patron aussi, a fini par racheter son entreprise à celui-ci qui prenait sa retraite.
Se retrouvant ainsi propulsé chef, avec tout ce que ça implique. Et notamment, le changement de perception que ses proches et contacts pouvaient avoir de son métier de « patron ».
Dans notre échange, en filigrane, la découverte pour lui de cette solitude du chef. Une solitude liée à l’incompréhension, pas tant parce que les autres ne veulent pas comprendre, que -simplement- parce qu’ils ne vivent pas cette responsabilité de décider, de choisir et d’en assumer les conséquences. Comment pourraient-ils alors mesurer cette bataille du quotidien pour le bien de sa boîte, pour ce qu’elle créée, pour les gens qui y travaillent, pour à son humble niveau, essayer de monter quelque chose de bien, de sain, pour poursuivre et s’améliorer encore ?
On se fait assez bien à l’idée d’être vu comme un salaud de patron qui exploite ses subordonnés : il y a des gens caricaturaux partout. Mais ne pas réussir à être compris par des honnêtes gens, même grossièrement, est un sentiment très différent. Alors en soirée il se présente comme ingénieur. Tous comptes faits : c’est plus facile de tenir une conversation ensuite.
Quant à moi, je suis toujours photographe indépendante. J’ai certes la chance d être entourée par une formidable équipe de filles géniales, mais c’est vrai, je me suis retrouvée dans son discours. Il y a des expériences qui s’éprouvent et ne se racontent pas. Et les évoquer avec des gens qui n’ont pas du tout la même perception du quotidien créée souvent plus de frustration et de solitude que ne rien dire du tout !
D’ailleurs, je suis passée voir mes parents en rentrant de reportage, mon père m’a demandé « mais alors, comment ça se passe, y a des gens qui te payent pour prendre des photos ? »
Oui Papa, et ça ne fait jamais que 15 ans que je vis comme ça, mais je suis heureuse que tu te poses la question maintenant, il n’est jamais trop tard ![Ref:4323-11-3550 SAED 3eREI] sandrachenugodefroy.com © 2023
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